Le risque de mort subite au cours du sport minime chez la femme comparée à l’homme selon des données Européennes - Auteur : Eloi Marijon
“ESCAPE-NET : Sudden Cardiac Arrest during Sports in Women in European Union”, présenté en Late Breaking Science le 28 août au congrès de l’ESC par Orianne Weizman (HEGP, Paris).
La survenue d’un arrêt cardio-respiratoire au cours du sport est un évènement rare mais grave et particulièrement marquant. L’augmentation de la pratique sportive des femmes, tant au niveau professionnel qu’amateur, rend la recherche dans ce domaine de plus en plus nécessaire. Pourtant, les données sont le plus souvent difficilement extrapolables en raison du très faible nombre de cas observés de « mort subite » au cours du sport.
Le dispositif ESCAPE-NET est une association européenne de plusieurs registres incluant de manière prospective tous les cas d’arrêt cardiaque extra-hospitalier survenant dans leur zone d’étude. Dans cette analyse, les données de trois registres européens ont été combinées, incluant plus de 35 000 cas de mort subite (le Centre d’Expertise de Mort Subite de Paris, le registre hollandais ARREST d’Amsterdam et l’essai Suédois de Réanimation Cardiopulmonaire de Stockholm), avec un focus sur les données en fonction du sexe. Ces registres couvraient chacun plus de 10% de la population de leur pays pendant plusieurs années consécutives.
L’incidence de la mort subite au cours du sport chez la femme était estimée, en moyenne dans ces 3 registres, à 0.19 cas par millions de femmes par an contre 2.63 par millions d’hommes par an, soit un risque plus de 10 fois inférieur à celui de l’homme ! Au total, on compterait moins de 100 cas de mort subite par an au cours du sport chez les femmes dans toute l’Europe. Chez les hommes, cette estimation s’élève à 1350 cas par an environ.
Globalement, les caractéristiques initiales et la prise en charge extrahospitalière étaient similaires entre les femmes et les hommes. Seul le degré d’intensité de l’effort différait : on retrouvait une activité physique intense plus souvent chez les hommes, tandis que celle-ci était plus souvent décrite comme légère ou modérée chez les femmes. En parallèle, on notait significativement plus de rythmes non choquables chez les femmes (40.7% vs. 19.1% chez les hommes, p<0.001) et ce malgré des caractéristiques et des délais de prise en charge identiques.
La cause de la mort subite au cours du sport était majoritairement (>50%) étiquetée comme inconnue (non recherchée) ou idiopathique (inconnue mais recherchée), et ce chez les hommes comme les femmes. Venait ensuite l’infarctus du myocarde (environ 30% des cas) puis les cardiomyopathies et les cardiopathies électriques (<10%).
Enfin, le pronostic à l’admission et à 1 mois après l’évènement était plutôt bon comparé aux autres contextes d’arrêt cardiaque extra-hospitalier (60% de survie à l’admission, 45% de survie à 1 mois), sans différence entre les 2 sexes.
- Le risque de mort subite au cours du sport est très faible chez la femme comparée à l’homme. Moins de 100 cas de mort subite au cours du sport chez la femme sont attendus par an dans toute l’Union Européenne !
- Cette différence entre les deux sexes ne semble pas expliquée par le profil initial ni par la prise en charge extrahospitalière. Le rationnel physiopathologique de ce très faible risque de mort subite au cours du sport chez la femme n’est pas encore clair.
- Ces résultats questionnent également nos pratiques de dépistage avant la pratique du sport : devrait-on adapter ce dernier en fonction du sexe ?
Figure : A gauche : principaux résultats de l’étude. A droite : nombre estimé de cas de mort subite au cours du sport estimés chez la femme par an et par pays européen.